Prix LITRA 2020

Les transports publics doivent être renforcés, en particulier suite aux déboires dus à la pandémie du coronavirus. En effets, ils sont un facteur considérable permettant à la Suisse d’atteindre ses objectifs en matière de climat. Pour maintenir et consolider leur position, les transports publics doivent s’en remettre aux nouvelles impulsions de la politique et du secteur du transport public. Le Prix LITRA 2020 récompense trois travaux qui permettront de relancer les transports publics du point de vue de différentes disciplines. Le Prix LITRA a été décerné lors de l'Assemblée des membres de la LITRA le 16 septembre 2020 par le Conseiller fédéral Guy Parmelin.

Félicitations!

De gauche à droite: Alain Azzi et Florin Bircher (lauréats), le Conseiller fédéral Guy Parmelin, Raphael Graber et Severin Stiner (lauréats)

Bus électriques: quel concept de recharge permettra la transition?
Les transports publics sont aujourd’hui bien moins polluants que les transports individuels motorisés. Les nouvelles technologies permettent dès aujourd’hui de réduire encore les nuisances, notamment dans les transports en bus. Au cours des prochaines années, de nombreuses entreprises de transport en Suisse vont devoir relever un défi de taille : proposer une flotte de bus sans émissions. Cela soulève deux questions : les moteurs électriques peuvent-ils assurer le trafic sur les lignes existantes et quel est le prix de la transition? Alain Azzi, diplômé de l’EPFL en génie mécanique, a mis au point, lors de son mémoire de master, un modèle utile pour les processus décisionnels des entreprises de transports publics. Pour cela, il a imaginé un modèle permettant de calculer le besoin en énergie pour toutes les lignes du réseau de bus de l’agglomération lausannoise. En l’associant au plan de circulation des bus, il calcule pour chaque ligne la solution la plus adaptée et la plus économique pour l’entreprise. Le programme propose trois options techniques: Overnight Charging (ONC, recharge de nuit au dépôt), Opportunity Charging (recharge lors du temps de rebroussement) et In Motion Charging (recharge lors de la circulation sous la caténaire). L’analyse a révélé que, sans changement d’horaire, presque tout le réseau urbain de bus de l’agglomération lausannoise peut passer à l’électrique : 24 des 25 lignes étudiées sont adaptées à une exploitation électrique. Ce réseau pourrait être électrifié à l’horizon 2030, avec un budget d’investissement de l’ordre de 15 millions par an. La technologie privilégiée serait alors la recharge lors du temps de battement aux terminus. L’outil développé peut s’adapter à d’autres réseaux en adaptant certains paramètres. D’autres entreprises de transports pourront ainsi calculer précisément le besoin en énergie en fonction du trajet afin de déduire si le passage à l’électrique est envisageable et les conditions pour y parvenir.

Le projet de Master de M. Azzi nous a servi de base pour notre publication "En route vers des transports publics climatiquement neutres".

Sécurisation des recettes: comment réduire le resquillage?
Le resquillage concerne 3% des trajets effectués dans les transports publics, et seuls 10% sont amendés. Les transports publics enregistrent ainsi chaque année un manque à gagner de plus de dix millions de francs. Florin Bircher, diplômé de la School of Management and Law de la ZHAW, a étudié, dans le cadre de son mémoire de master, la manière de prévenir le resquillage en Suisse, imaginant des mesures de prévention et de sanctions pour prévenir ce phénomène. Il s’est tout d’abord basé sur les études actuelles pour analyser le registre des resquilleurs. Il a ensuite réalisé des entretiens qualité avec des experts en sécurisation des recettes qui lui ont permis de rédiger un catalogue de mesures de prévention et de sanctions qui sont testées dans le cadre d’une expérience en ligne. Ce projet a permis de confirmer l’effet préventif de contrôles ponctuels, notamment lorsqu’ils sont annoncés. En outre, des différences ont été constatées en fonction du sexe: l’augmentation de l’amende en cas de récidive mais aussi l’aspect moral ont plus d’impact sur les femmes que sur les hommes. La mise en place pratique du facteur moral devra être analysée plus en profondeur, de même que le fait que certaines mesures n’ont aucun impact sur les hommes. Conclusion du projet: les aspects économiques comportementaux doivent être mieux pris en compte lors de la prévention et de l’amendement des resquilleurs. Cela pourrait se faire sans grands frais financiers, mais avec des effets remarquables sur la sécurisation des recettes. En bref, la sécurisation des recettes devrait avoir plus d’importance et devenir partie intégrante des sujets abordés dans le secteur.

Stabilité des horaires: où sont les points névralgiques?
Un horaire stable est une condition indispensable pour la ponctualité et la qualité des transports publics. La ponctualité constitue également un indicateur de performance lors de l’évaluation de l’offre par rapport aux commanditaires et dans des programmes incitatifs des entreprises. Raphael Graber et Severin Stiner, diplômés de la School of Engineering ZHAW, ont voulu en avoir le cœur net: ils ont mis au point un modèle permettant d’analyser la stabilité de l’horaire des Chemins de fer rhétiques sur le trajet Coire – St Moritz. Pour cela, ils ont pris en compte des facteurs tels que la fréquence de passage des trains, l’arrivée et le départ, les correspondances, les croisements, les rebroussements et les liaisons. Ils réalisent des calculs pour l’horaire de 2020 et pour l’horaire de 2030+. Leur analyse leur permet de déterminer la stabilité de l’horaire dans son ensemble. Elle révèle des points névralgiques du réseau ayant tendance à générer des retards ou pouvant déclencher une réaction en chaîne de retards. L’horaire actuel révèle un tel point névralgique à la gare de Filisur, entourée de voies simples. Pour l’horaire 2030+, le point critique se déplace en gare de Coire, où l’horaire cadencé intégral génère plus de dépendances. Avec quelques adaptations, l’analyse de la stabilité des horaires pourra être utilisée sur d’autres trajets et réseaux. Elle permettra à l’exploitant de chemin de fer de prévoir les effets des modifications de l’horaire, afin d’identifier en amont des goulots d’étranglement et de prendre des mesures d’exploitation et de construction pour y remédier.